Gestionnaire des ressources financières sur le terrain : un défi passionnant !
Yannick est diplômé en Sciences Politiques et en Economie. Après avoir travaillé quelques années dans le secteur privé, il souhaite s’ouvrir à un contexte international et rejoindre une organisation engagée : il postule alors chez Médecins Sans Frontières (MSF) et part en janvier 2021 pour une première mission à Masisi (République Démocratique du Congo) en tant que Project Finance Manager. Après une pause de quelques mois, il repart. Cette fois-ci pour l’Afghanistan. Il nous raconte le défi que représente sa deuxième expérience en tant que Projet Supply Finance Manager à Kunduz. « Cette expérience est un défi, mais c’est une expérience très enrichissante ! »
« Pour vous parler du contexte général de la mission : MSF a reconstruit un nouvel hôpital. Depuis 6 mois, celui-ci est ouvert. Nous sommes focalisés sur la prise en charge des traumas, des victimes de guerre ou de bombes, des accidents de la route. C’est un très grand projet, ça bouge beaucoup… Et bien sûr, avec le contexte actuel, le changement au niveau du gouvernement est une grande inconnue. »
Qui dit grand projet, dit aussi grande équipe.
« Pour l’aspect construction, on travaille avec des profils assez techniques, notamment un architecte et un ingénieur électrique. Ils sont chargés de surveiller l’avancement des constructions. Côté hôpital, il y a bien entendu une grande équipe médicale (avec certains profils assez spécifiques, comme des infirmières pour les ER et ICU). Et enfin l’aspect plus administratif du projet. Mon rôle de Project Supply Fin Manager m’amène à travailler en partie avec l’approvisionnement et en partie avec les finances. Sans oublier mes collègues responsables en Ressources Humaines, le coordinateur du projet et la personne responsable de la logistique. Au total on est une quinzaine de staff mobile international. »
« Je travaille avec deux départements (Approvisionnement – ou « Supply » dans le jargon MSF et Finance). Tous les matins, j’ai une réunion avec mon équipe pour établir les priorités de la journée. En matière de finance, on doit surtout régler le paiement des fournisseurs et des constructeurs. Puis, bien sûr, le paiement des salaires. Il faut bien faire le suivi des différentes tâches et toujours vérifier si les factures sont correctes, si tous les documents sont là. D’ailleurs, le principe de Responsabilisation est un des principes clés chez MSF. Le suivi du budget et des dépenses, établir des prévisions fait également partie de mon travail, tout comme apporter un soutien à mon équipe. Coté approvisionnement, c’est une partie de mon travail que je trouve particulièrement intéressante. Il faut se rendre au marché, travailler avec les fournisseurs locaux, établir les contrats et faire en sorte de soutenir toutes les activités du projet. Je dois aussi m’assurer que le matériel que nous commandons pour tous les départements via MSF Supply arrive en temps et en heure sur le terrain. Si l’on n’arrive pas à se coordonner avec MSF Supply ou si ça prend trop de temps, on va au marché local pour trouver tous les produits nécessaires au bon fonctionnement du projet. »
Le département Supply a une fonction de soutien en termes de stock et de produits. Pour coordonner toutes ces activités, Yannick est épaulé par des collaborateurs locaux : trois en Finances et huit à l’approvisionnement. « C’est un peu le défi de mon poste. »
Collaborer avec l’équipe, cela s’apprend.
« J’ai appris à bien écouter le staff recruté localement : pour comprendre pourquoi certaines décisions sont prises {…} Je me rappelle ma première mission, quand je venais de commencer. J’avais en tête plein d’idées pour gérer les choses « à la belge ». Et en fait j’ai dû prendre le temps de comprendre, d’écouter, d’apprendre comment faire les choses en m’adaptant à la culture et aux façons de faire du pays. Par exemple, en mission, toutes les personnes avec lesquelles on travaille ne parlent pas nécessairement notre langue. Il faut donc passer par des traducteurs. Cela demande pas mal de patience et de temps d’écoute. Il faut savoir respecter les cultures de nos collègues et s’adapter à des contextes très différents et religieux. C’est un défi quotidien. J’apprends beaucoup des équipes locales. Je suis très heureux de travailler dans un contexte international. Cela amène bien sûr des défis mais c’est particulièrement enrichissant. »
Travailler à l’étranger signifie quitter vos proches pour un certain temps. Pour garder contact, nos employés internationaux misent sur internet.
« Parfois, il y a des interruptions mais même en RDC et ici en Afghanistan, la connexion internet est assez stable. Il faut juste prendre en compte le décalage horaire pour garder le contact avec ma famille. MSF fait vraiment un effort pour s’assurer que la connexion soit bonne. Pour beaucoup de mes collègues dont la famille est loin, c’est très important. »
Travailler avec MSF sur le terrain, c’est représenter MSF jour et nuit, 7 jours sur 7, même durant son temps libre et ses congés. Il est donc vital de respecter les règles mises en place par MSF. « Dans un contexte de grande insécurité tel que Kunduz, les interactions sont assez limitées. Le plus grand garant de sécurité pour MSF, c’est l’acceptation par la population locale. Les communautés savent que MSF fournit une aide médicale gratuite, que nos équipes sont là en support. Bien sûr je ne peux parler que de ma propre expérience, mais en tout cas, l’acceptation de la population locale est sensationnelle. Et c’est ce qui garantit notre sécurité. »
En travaillant à l’étranger avec MSF, vous devrez aussi vous adapter à plusieurs changements en ce qui concerne la nourriture, le logement, le rythme de vie, les loisirs, la langue. Un nouveau style de vie vous attend dans lequel l’intimité et les temps libres peuvent être rares. Pour Yannick, les moments de détente passent par la cuisine, le sport, et les jeux de société. « Cela me détend de pouvoir aller courir ou faire du vélo. On joue à des jeux de société, on chante. Vivre et travailler avec ses collègues fait qu’on a des liens assez forts. Ici à Kunduz on a aussi une grande bibliothèque avec pas mal de choix. Parfois il faut être créatif en matière de cuisine. Il faut s’adapter à ce qui est disponible dans le pays aussi, à la nourriture locale. Et partager aussi les espaces. On vit ensemble. Il faut être conscient de cela, faire un effort, nettoyer après avoir pris sa douche est un exemple (rire). Il faut être flexible. De ce que j’ai vu dans mon expérience. La plupart des staffs sont très motivés ; et ça, ça change tout : on est là dans un but commun. C’est ce qui aide à accepter les petites déconvenues du quotidien. »
Et après ?
« La vie MSF est assez intense. C’est beaucoup d’adrénaline. Une fois qu’on rentre à la maison, il faut être capable de ralentir. Pour moi, c’est voir ma famille, mes amis. Avoir une vie normale : aller au supermarché, être à la maison. C’est quelque chose que j’ai appris en rentrant de ma première mission : à bien me reposer. Et après quelques mois j’ai à nouveau l’énergie pour repartir. »