Soudan

En 2023, une guerre brutale a éclaté au Soudan. Médecins Sans Frontières a rapidement adapté ses activités pour répondre à la situation malgré des défis sécuritaires et administratifs.
La situation humanitaire au Soudan est considérée comme une crise négligée, c’est-à-dire qu’elle ne retient pas l’attention de la communauté internationale, des médias et du public. MSF a organisé une conférence sur le cas du Soudan regroupant plusieurs experts afin de rendre compte de cette réalité.
La guerre au Soudan
Le 15 avril 2023, des combats intenses et inattendus ont éclaté à Khartoum, la capitale du Soudan. Le conflit oppose les Forces armées soudanaises et les Forces paramilitaires de soutien rapide (FSR). Le chaos et la violence ont gagné l’ensemble du pays.
Quelque 8 millions de personnes ont été déplacées à l'intérieur du pays et 3 millions d'autres ont cherché à se mettre à l'abri hors du Soudan. Il s'agit de la plus grande crise de personnes déplacées à l'intérieur du pays dans le monde.
Les civils continuent d'être pris dans des combats intenses entre les forces armées soudanaises et les forces de soutien rapide.
Depuis avril 2023, nous avons réorienté nos efforts humanitaires au Soudan afin de répondre aux besoins émergents des populations dans le cadre du conflit en cours. Nos équipes soignent les blessures causées par les explosions, les balles et les coups de couteau.
Les priorités médicales gravement compromises par le conflit
Le traitement de la malnutrition et les campagnes de vaccination sont des activités prioritaires pour MSF au Soudan, tout comme elles l'étaient avant avril 2023.
Ce travail devient plus difficile à réaliser dans un contexte où les fournitures ne peuvent pas être livrées et où les structures de santé et les travailleurs sont attaqués et pillés.
Malgré les difficultés, nos équipes travaillent dans 11 des 18 États du Soudan, fournissant aux populations les soins médicaux et les services de base dont elles ont un besoin urgent.
Les actions de MSF au Soudan
Soutien aux structures de santé et aux hôpitaux
Intervention au Nord-Darfour
Dans les premières 48 heures de combat, l’hôpital Sud d’El Fashir, soutenu par MSF, a accueilli 136 blessés. Ils ont été soignés à même le sol et dans les couloirs à cause du manque de place. A l’origine, il s’agissait d’une petite maternité sans capacité chirurgicale.
Dans les semaines suivantes, nous avons doté l’hôpital d’un bloc opératoire et d’un service d’urgence. L’objectif est de pouvoir gérer des événements impliquant de nombreuses personnes blessées.
Soutien à Khartoum
À Khartoum, où la guerre a commencé, de violents combats de rue, des bombardements et des frappes aériennes ont ravagé la ville. Les personnes qui le pouvaient ont fui la ville. Mais beaucoup sont restées bloquées chez elles à cause de l’intensité des combats.
La plupart des hôpitaux de la ville ont rapidement cessé de fonctionner. Les structures qui ont pu rester ouvertes ont rapidement été débordées.
Les actions des équipes de MSF à Khartoum :
- Dons de matériel médical aux hôpitaux et évaluation des besoins.
- Présence d’une équipe chirurgicale complète à l’hôpital universitaire de Bashair.
- MSF est pleinement opérationnelle dans l’hôpital turc.
- Adaptation des établissements de soins pour gérer des événements impliquant de nombreuses personnes blessées.
À Omdurman
- Soutien à l’hôpital Al Nao : soins des personnes atteintes de blessures par balle, arme blanche et éclats d’obus, ainsi que d’affections non traumatiques.
En juillet et août, nos équipes ont commencé à travailler dans les unités de pédiatrie et de maternité de l’hôpital d’Umdawanban, dans l’État de Khartoum, et dans l’hôpital Alban Al-Jadeed, le seul hôpital public encore en activité à l’est de cet État.
Dans l’état de Al Jazirah
Au début de la guerre, des centaines de milliers de personnes ont fui vers le sud à Wad Madani, dans l’État de Al Jazirah, pour échapper aux combats à Khartoum.
Entre mai et novembre, nos équipes ont mené des consultations médicales dans les structures de santé existantes et via des cliniques mobiles. Au moins 40% concernaient des enfants.
Travail dans les camps de réfugiés
Nous avons lancé des activités dans l’État du Nil Blanc. Les équipes qui travaillaient déjà dans plusieurs camps surpeuplés de personnes réfugiées et déplacées ont été débordées par le nombre quotidien d’enfants atteints de rougeole et de malnutrition.
Lutte contre la malnutrition
Même après que le comité d'examen de la famine du CIP a conclu qu'une famine était en cours dans le camp de personnes déplacées de Zamzam, dans l'État du Darfour Nord, nos équipes continuent de fournir aux enfants présents des soins pour lutter contre la malnutrition.
Les graves pénuries de fournitures médicales, dues aux blocages imposés par les parties en conflit, compliquent nos actions.
Au sud de Khartoum, l'hôpital universitaire de Bashair enregistre une hausse inquiétante des cas de malnutrition. Depuis janvier 2024, MSF a pris en charge 39 000 cas de malnutrition au Soudan.
Soutien aux soins maternels
L'État du Sud-Darfour connaît des pires situations d'urgence en matière de santé maternelle au monde.
Entre janvier et août 2024, 46 décès maternels ont été recensés dans les hôpitaux universitaires de Nyala et de Kas Rural, où nos équipes assurent des soins obstétriques et d'autres services médicaux.
En raison de la pénurie de centres de santé fonctionnels et des coûts de transport inabordables, de nombreuses femmes enceintes et accouchées arrivent à l'hôpital dans un état critique.
La vaccination
Même avant que le conflit n'éclate, la couverture vaccinale pour les maladies évitables, comme la rougeole, était faible au Soudan. Aujourd'hui, on s'attend à ce qu'encore plus d'enfants ne soient pas vaccinés à cause de la guerre.
Nos équipes s'attaquent à ce problème en fournissant des vaccins de rattrapage et des vaccins de routine. En 2024, plus de 70 000 doses ont été distribuées.
Dans l'État du Nil Blanc, nous avons collaboré avec le ministère de la Santé pour vacciner les enfants lors d'une épidémie de rougeole, contribuant à une baisse des cas signalés.
Chirurgie et soins traumatiques
La chirurgie, y compris les soins de traumatologie pour les blessures liées à la guerre, est l'une des principales activités de MSF au Soudan.
Malgré des salles d'urgence débordées et un manque de fournitures, nos équipes d'urgence travaillent avec le personnel hospitalier pour fournir des soins chirurgicaux vitaux aux personnes blessées par des coups de feu et des explosions de bombes. Cela inclut les enfants, qui représentent un patient sur six parmi les blessés de guerre à l'hôpital universitaire de Bashair, dans le sud de Khartoum.
Fournitures
L'acheminement de l'aide humanitaire à travers le Soudan s'est avéré extrêmement difficile, que ce soit parce que les routes ont été détruites ou parce que les itinéraires de transport habituels sont devenus trop dangereux.
Des parties armées bloquent aussi délibérément l'acheminement de nos fournitures. Ces blocages inutiles ne font qu'empêcher les gens de recevoir des soins médicaux. Nous continuons d'appeler les parties belligérantes, et ceux qui ont une influence sur elles, à garantir l'acheminement sans entrave de l'aide humanitaire dans tout le Soudan.
Impacts du conflit dans la région du Darfour
Attaque et pillage d’infrastructures de MSF
La vaste région du Darfour est redevenue, comme au début et au milieu des années 2000, un épicentre de la violence. Un calme relatif s’est certes installé au Nord-Darfour après plusieurs semaines d’intenses combats. Mais, l’attaque et le pillage d’un complexe et d’un entrepôt de MSF à Nyala, au Sud-Darfour, ont entraîné la suspension de toutes nos activités dans la ville et ses environs.
Darfour Occidental : pillage des structures de santé
Au Darfour Occidental, l’hôpital d’El-Geneina, soutenu par MSF, a également été pillé et gravement endommagé pendant les violences. La ville est devenue si dangereuse qu’elle est restée inaccessible pendant plusieurs mois.
Des massacres majeurs
Au cours de l’année 2023, deux massacres majeurs ont été perpétrés au Darfour Occidental : on estime qu’entre 10.000 et 15.000 personnes ont été tuées lors de violences ethniques ciblées dans la seule région d’El-Geneina.
De nombreux incidents impactant les installations de MSF
Alors que les combats continuaient de s’intensifier, le pillage des structures de santé et les attaques contre les bâtiments et le personnel de santé sont devenus une caractéristique du conflit.
L’Organisation mondiale de la Santé a documenté un total de 63 incidents durant l’année. Nombre d’entre eux ont eu lieu dans les installations et locaux de MSF.
Les autorités soudanaises freinent les actions de MSF
Nous avons redoublé nos efforts pour étendre notre intervention au Soudan. Mais nous avons fait face à d’innombrables obstacles. Les visas de nos équipes d’urgence expérimentées ont été retardés à plusieurs reprises.
En septembre 2023, les autorités soudanaises ont interdit le transport de matériel médical et chirurgical à Khartoum. Leur but était d’empêcher les soldats blessés des FSR de recevoir des soins essentiels. Elles ont également interdit au personnel humanitaire de se rendre dans les zones contrôlées par les FSR. Ces restrictions ont entraîné le retrait de notre équipe chirurgicale de l’hôpital de Bashair.
Contrôle des FSR
En décembre 2023, les FSR avaient pris le contrôle de toutes les grandes villes du Darfour, à l’exception d’El Fashir, où l’hôpital Sud était devenu le principal centre de référence pour tous les États du Darfour. À ce moment-là, nous avions aussi repris notre soutien à l’hôpital d’El-Geneina.
Les FSR ont pris le contrôle de l’État d’Al Jazirah en décembre. On estime à 500.000 le nombre de personnes de nouveau déplacées par la violence. Pour répondre à leurs besoins, nous avons élargi nos interventions dans les États d’El-Gedaref et Kassala.
MSF poursuit ses activités malgré les difficultés
Nous avons maintenu notre assistance médicale à Rokero, dans la zone montagneuse du Djebel Marra, et à Kreinik.
Nous avons continué nos activités médicales durant toute l’année dans plusieurs États de l’est du Soudan, dont le Nil Bleu. Nous y avons traité la malnutrition et soutenu des cliniques mobiles à Ad-Damazin et dans ses environs.
Un désastre huminataire et médical
Au Soudan, cette crise humanitaire persiste depuis longtemps. En soutenant notre Fonds d'urgence, vous nous aidez à déployer rapidement l'aide nécessaire aux populations les plus vulnérables.