Mer Méditerranée
Depuis 2015, et malgré des défis politiques et opérationnels croissants, Médecins Sans Frontières (MSF) est parvenu à poursuivre ses opérations de recherche et de sauvetage en Méditerranée. Malheureusement, dès le 13 décembre 2024, MSF a dû mettre fin à ses activités avec le navire Geo Barents, qui était opérationnel depuis 2021. En effet, les lois et politiques italiennes ont rendu impossible la poursuite de son modèle opérationnel.
Nos équipes ont apporté secours et soins d'urgence à plus de 85.000 personnes en détresse qui ont effectué la dangereuse traversée de la mer Méditerranée.
2023, une année meurtrière
En 2023, plus de 2 500 personnes ont perdu la vie ou ont été portées disparues en tentant de franchir la Méditerranée centrale en bateau, faisant de cette année la plus meurtrière depuis 2017.
Un taux de mortalité alarmant en Méditerranée centrale. Un chiffre pourtant sous-estimé. Le nombre réel de décès est sans doute beaucoup plus élevé.
Une augmentation des traversées
Les arrivées par mer en Italie ont augmenté de 50 % par rapport à 2022, avec la Tunisie comme principal point de départ, dépassant désormais la Libye.
Cette augmentation significative des départs, aggravée par l’insuffisance des capacités de sauvetage des états, a entraîné une hausse alarmante du nombre d'embarcations en détresse et de naufrages.
Une fois de plus, nos équipes ont été les témoins directs des conséquences des politiques frontalières violentes et de l'inaction délibérée des États européens en Méditerranée centrale.
Le navire de sauvetage de MSF : le Geo Barents
Depuis le début des actions en Mer méditerranée, huit navires MSF différents ont contribué à secourir plus de 92.000 personnes. Le navire actuel, le Geo Barents, a pris en charge des milliers de survivants.
Après chaque sauvetage, notre équipe au sein du Geo Barents fournit une assistance médicale et psychologique aux personnes en détresse. Nous soignons l'hypothermie, la déshydratation et le mal de mer, conséquences des conditions éprouvantes de ces embarcations de fortune.
Les patients souffrent également de brûlures causées par un contact prolongé avec le carburant des bateaux, ainsi que d'infections cutanées et de douleurs générales, auxquelles s’ajoutent les blessures liées aux conditions inhumaines subies dans les centres de détention en Libye.
De nombreuses personnes ont également rapporté avoir été soumises à des niveaux extrêmes de violence, y compris de la torture et des violences sexuelles, dans leur pays d'origine et/ou dans les pays de transit.
Des politiques restrictives qui freinent les opérations de sauvetage
Les nouvelles politiques et pratiques adoptées par les autorités italiennes ont engendré de nombreux obstacles aux opérations humanitaires de sauvetage en mer. Les navires des ONG sont désormais contraints de retourner au port après chaque opération de sauvetage, ce qui les oblige à ignorer d’autres alertes concernant des bateaux en détresse.
Le nouveau décret italien
Cette pratique a été exacerbée par un nouveau décret, approuvé par le Conseil des ministres italien, qui stipule que les ONG doivent introduire une demande pour accoster dans un port et s'y rendre "sans délai" au lieu de rester en mer pour rechercher d'autres bateaux en détresse.
Les navires des ONG ont également été redirigés vers des ports éloignés du nord de l'Italie pour débarquer les survivants, malgré la disponibilité de ports plus proches. Ces mesures ont considérablement réduit le temps que les ONG peuvent consacrer à patrouiller en mer pour secourir d’autres personnes en détresse.
Un débarquement ralenti
Nos équipes sont souvent confrontées à de longs retards dans l'attente d'un endroit sûr pour le débarquement des survivants, les personnes passant en moyenne neuf jours à bord. Les autorités italiennes ont voulu introduire une politique de "débarquement" sélectif n'autorisant dans un premier temps que les personnes jugées vulnérables à quitter le navire.
En 2022, lorsque la santé mentale des survivants s'est rapidement détériorée et que la situation est devenue intenable, toutes les personnes restantes ont finalement été autorisées à débarquer et la politique a été abandonnée.
Le sabotage volontaire de nos sauvetages
Le Geo Barents perd régulièrement de précieuses journées en naviguant vers des ports inutilement éloignés. Notre bateau de sauvetage est souvent immobilisé pendant de longues périodes pour non-respect d’une nouvelle loi ce qui l’empêche de poursuivre ses opérations de sauvetage et d’aide humanitaire.
En 2023, le Geo Barents a perdu 100 jours en navigant vers des ports inutilement éloignés et il a été immobilisé pendant 20 jours pour non-respect de la nouvelle loi.
MSF continue son combat
Médecins Sans Frontières dénonce les conséquences meurtrières des politiques migratoires européennes et le manque de routes migratoires sûres et légales.
MSF appelle les institutions européennes et les États membres à donner la priorité à la sécurité des personnes arrivant sur les côtes européennes.
MSF exige l’arrêt du soutien matériel et financier des garde-côtes libyens et des retours forcés vers la Libye, où la torture et la maltraitance des migrants a déjà été publiquement prouvée.
Pour en savoir plus sur nos activités de migration, consultez le rapport en anglais de MSF 2023 sur la migration: